Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
L'Olivier
Archives
19 mars 2009

Les langues se délient en Israël

Des témoignages fournis par des militaires israéliens ayant participé à l'assaut sur la bande de Gaza, de décembre à janvier, mettent à mal la version de officielle de l'État hébreu, selon laquelle ses soldats ont agi dans les meilleurs standards de moralité.

Les soldats racontent plutôt des histoires qui mettent en évidence des règles d'engagement permissives, ayant entraîné la mort de civils sans défense, et des destructions de biens non justifiées.

Les témoignages en question proviennent de douzaines de diplômés d'une académie militaire portant le nom d'Yizthak Rabin. Ils ont été publiés cette semaine dans un bulletin d'information destiné aux diplômés et sont repris dans les pages du quotidien Haaretz. Les récits, provenant aussi bien de pilotes d'avion de combat que de fantassins, offrent un rare point de vue israélien non officiel sur ce qui s'est passé à Gaza.

Dans des extraits publiés jeudi par Haaretz, un responsable d'une unité d'infanterie raconte par exemple qu'une vieille Palestinienne a été abattue sur ordre d'un commandant de compagnie parce qu'elle se trouvait à moins de 100 mètres d'une maison occupée par l'armée israélienne.

Le militaire raconte aussi avoir eu une discussion avec son supérieur au sujet des règles d'engagement qui permettaient de « nettoyer » des maisons en abattant ses occupants sans avertissement. Après que les ordres eurent été changés, les soldats sous ses ordres se sont plaints: ils voulaient « tuer tout le monde dans le centre de Gaza », sous prétexte qu'ils « sont tous des terroristes là-bas ».

« On n'a pas l'impression que les officiers agissent selon une selon une logique, mais ils ne disent rien. Écrire "mort aux arabes" sur les murs, prendre des photos des familles et cracher dessus, juste parce qu'on peut le faire. Je pense que c'est l'essentiel [du problème]: comprendre à quel point l'armée israélienne en a perdu en terme d'éthique. C'est ce dont je vais me souvenir le plus », ajoute le militaire.

L'offensive israélienne contre la bande de Gaza a duré du 27 décembre au 18 janvier.

Un autre responsable d'unité d'infanterie raconte qu'une Palestinienne et ses deux enfants ont été abattus par erreur: ils étaient évacués d'une maison sur laquelle se trouvait un tireur d'élite avait pris position. Les victimes avaient pris le mauvais chemin et le tireur n'avait pas été avisé de la décision de les laisser partir.

Dès qu'ils ont franchi une ligne de démarcation, le tireur « les a abattus tout de suite », raconte le soldat. « Les vies des Palestiniens sont, disons, quelque chose de beaucoup, beaucoup moins important que la vie de nos soldats », admet-il.

Selon AFP, le directeur de l'académie, Dany Zamir, a déclaré à la radio publique qu'il s'agissait de « témoignages très durs sur des tirs injustifiés contre des civils, de destructions de biens qui dénotent une atmosphère dans laquelle on se croit permis d'utiliser la force sans restriction contre les Palestiniens ».

M. Zamir dit avoir informé le chef d'état-major de l'armée israélienne, Gabi Ashkenazi, de ses craintes au sujet d'une perte de sens moral au sein des troupes israéliennes. Le général Ashkenazi a requis et obtenu une transcription des témoignages. Un responsable de la formation au sein de l'armée israélienne dit que l'armée n'était pas au courant des histoires rapportées, mais que les témoignages feront l'objet d'une enquête.

Un commentateur du quotidien est d'avis que l'armée a intérêt à faire preuve de diligence dans ce dossier. « Quand les témoignages ne viennent que de témoins palestiniens ou de la "presse hostile", il est possible de les écarter en les accusant d'être de la propagande au profit de l'ennemi. Mais que pouvons-nous faire quand ce sont des soldats qui racontent l'histoire? », écrit Amos Harel.

Interrogé sur les ondes de la radio publique, le ministre de la Défense, Ehoud Barak, a confirmé qu'une enquête était en cours. Il a néanmoins défendu l'armée. « L'armée israélienne est la plus morale du monde, et je sais de quoi je parle, car je sais ce qui s'est passé en ex-Yougoslavie, en Afghanistan, en Irak. [...] Bien sûr, il peut y avoir des exceptions et tout ce qui a pu être dit va être vérifié. »

L'offensive israélienne, lancée dans le but officiel de faire cesser les tirs de roquettes en provenance de la bande de Gaza, a fait plus de 1300 morts, dont plus de 400 enfants, et 5000 blessés, selon un bilan fourni par les services médicaux palestiniens. Israël déplore 13 morts.

Radio-Canada.ca avec
Agence France Presse et Haaretz

Publicité
Commentaires
L'Olivier
Publicité
Publicité